César-Guillaume de La Luzerne naquit à Paris, le 7 juillet 1738 et fut baptisé le lendemain dans l'église paroissiale de Saint-Sulpice.
Le huit juillet mil sept cent trente-huit a été baptisé
César-Guillaume, né hier, fils du haut et puissant seigneur Messire
César-Antoine de La Luzerne, marquis de Beusseville, seigneur de Moulin,
Chapel et autres lieux, maréchal des camps et armées du roy, et de
haute et puissante dame Marie-Elisabeth de Lamoignon, son épouse,
demeurant rue de l'Université. Le parrain haut et puissant seigneur
Messire Guillaume de Lamoignon de Blanc-Mesnil, seigneur de Soisy, le
Bois, Malzherbes et autres lieux, ayeul maternel de l'enfant ; la
marraine haute et puissante dame madame Anne-Magdelaine Françoise de La
Luzerne Beusseville, veuve de haut et puissant seigneur Messire
René-François de Maillé, vivant marquis de Behenars (?), seigneur de la
Chahaigne, Béville, Le Lauvoüer et autres lieux, représentée par haute
et puissante dame madame Marie-Louise de Lamoignon, épouse de haut et
puissant seigneur Messire Guillaume
Castagnières, seigneur d'Oriac et autres lieux, maître des requêtes
ordinaire de l'Hôtel du roy et secrétaire des commandements de la
reine, fondée pour cela en procuration, en date du 10 may ; le père
présent et ont signé. Il est le deuxième fils de César-Antoine de la Luzerne, comte
de Beuzeville, maréchal des camps et armées du roi et de
Marie-Elisabeth de Lamoignon de Malesherbes, fille du chancelier (en 1750) Guillaume II de
Lamoignon, seigneur de Melesherbes, son épouse en secondes noces. Dirigé
vers l'ordre de Malte, il est reçu au rang de chevalier. A la sortie du
collège, il fait ses études en théologie au séminaire de
Saint-Magloire, puis à la maison de
Navarre. Le 19 août 1751, il est tonsuré par M. Christophe
de Beaumont dans la chapelle du palais archiépiscopal. Dans ce même
lieu, François Dondel, évêque, comte de Dol, lui confère les ordres
mineurs, le 20 mai 1758. En 1754, à l'âge de seize ans, il est nommé chanoine in minoribus de la métropole de Paris. En 1756, il reçoit l'abbaye de Mortemer, sise dans le diocèse de Rouen. Il est élevé au sous-diaconat, le 22 mars 1760 par M. de Beaumont. Le 7 mars 1761, il accède au diaconat, puis à la prêtrise le 27 mars 1762. La même année, il termine ses études théologiques au collège de Navarre et
se voit proclamé premier de
sa licence, après un examen, renonçant à la place d'honneur que l'usage
attachait à son titre de noblissime. Il prend dans la suite le bonnet
de docteur (Ce titre lui est attribué par l'abbé Mathieu, Abrégé de l'Histoire des évêques de Langres, p. 255, 2e édition.) Il est distingué par l'archevêque de Paris. Il est choisi pour vicaire-général par M. Dillon, archevêque de Narbonne. Il recevra par la suite un troisième bénéfice, la chapellenie de Notre-Dame de Pitié, au diocèse de Grenoble. Dans ses fonctions de grand-vicaire de Narbonne, il s'initie aux affaires d'un diocèse. En 1765, il est élu agent-général du clergé et prend part avec son collègue l'abbé Champion de Cicé à l'assemblée du clergé. 1766, il s'attaque avec Champion de Cicé aux
réquisitoires des parlements. C'est l'affaire de M. de Castillon,
procureur-général au parlement d'Aix. En 1770, l'année même où il est mis hors charge,
le roi Louis XV le nomme, le 24 juin, évêque de Langres. De Cicé, lui
sera nommé au siège de Rodez. Le 10 septembre 1770, il est consacré, à Paris, par Monseigneur Christophe de Beaumont du Repaire, évêque duc de Langres, pair de France, avec 52.000 livres de rente annuelle. Le roi l'avait nommé à ce siège en remplacement de M. de Montmorin. Il devient ainsi, l'un des six pairs ecclésiastiques de France, avec fonction au sacre des rois de France, en qualité d'évêque-duc de Langres, de porter le sceptre, et de sacrer le roi en l'absence de l'archevêque de Reims. Le diocèse de Langres, quoique démembré en 1731 par l'érection de l'évêché de Dijon, reste important. Il compte environ 700 paroisses ou annexes, divisées en 15 doyennés et son temporel est considérable. Les revenus du siège seront réglés en 1790 à 130.000 livres. Il fait son entrée à Langres le 17 septembre 1770. Le 19 octobre 1770, il publie son premier mandatement pour annoncer le jubilé accordé par Clément XIV à son avènement. En 1771, il complète l’œuvre de son
prédécesseur, M. de Montmorin, en règlementant les quêtes pour les
incendiés du diocèse de Langres. Il réside alors (1er septembre) au château de Mussy-l'Évêque, demeure affectionnée des évêques de Langres, construite par Sébastien Zamet. Le 8 décembre 1771 et l'octave de la fête de la
Conception furent consacrés, à Langres, à de belles cérémonies en
l'honneur de sainte Françoise Chantal, récemment canonisée, et
justement revendiquée par le diocèse de Langres, comme lui appartenant
par la naissance. Le 31 novembre de La Luzerne publie un mandement
glorifiant sainte Jeanne-Françoise de Chantal. il présidera lui-même à
l'ouverture des fêtes célébrées à la cathédrale et au monastère de la
Visitation Sainte-Marie (la Maison des Visitandines.) Le 4 février 1772, il révoque toutes les
permissions, privilèges et dispenses précédemment accordés afin de
mettre de l'ordre dans l'administration de son diocèse et corriger
d'éventuels abus. En avril 1772, il prêche un sermon pour l'aumône envers les prisonniers. En 1772, il siège aussi au parlement de Paris. Le
25 mai 1773, dans l'église métropolitaine
Notre-Dame de Paris, il prononce l'oraison funèbre de Victor-Emmanuel
III, roi de Sardaigne. L'année suivante, le 7 septembre 1774, dans
cette même église, il prononcera celle de Louis XV, roi de France. Fin 1775, il assiste à l'assemblée du clergé de France. En 1776, il publie le cérémonial du diocèse de Langres. En 1782, il remet son abbaye de Mortemer et est nommé abbé de Bourgeuil, au diocèse d'Angers. En 1783, il accorde l'autorisation de quêter dans son diocèse, pour les églises d'Orient,
aux RR. PP. Aghapios Mathar et Basilide Atallah, religieux
grecs-melchites-romains. Des églises et couvents de leur ordre
avaient brûlés aux environs de Seyde, dans une guerre des Turcs contre
les Druses de l'Anti-Liban. La même année il convoque à Langres un synode fameux. Il siège à l'Assemblée des notables en 1787. En janvier 1789, dans un mandement, il offre de consacrer la moitié de son revenu au soulagement de l'État. Il est élu, à l'unanimité du clergé de Langres, député du bailliage de Langres le 27 mars 1789 (Bailliage principal, sans secondaire, 4 députés, 80e circonscription électorale, Clergé). Dans le débat des Droits de l'Homme, il parle constamment contre la
déclaration et s'oppose à sa publication. Il se prononce en faveur du droit de veto absolu pour le chef de l'État. Membre de l'Assemblée nationale, il s'oppose à Mirabeau en proposant la création de deux Chambres et en défendant les prérogatives du clergé et de la noblesse. Il est l'un des premier à proposer l'adoption du système représentatif, tel qu'il existe en Angleterre. Le
11 mai, il fit distribuer aux députés du
clergé un mémoire demandant la permanence de la distinction des trois
ordres par l'établissement de deux Chambres. Mirabeau réfute vivement
cette idée de Chambre haute et de Chambre basse, la première étant une
menace ou une défense contre la seconde. Par la suite, il demande 300
députés de plus pour la noblesse et 300 de plus pour le clergé. Cette
proposition n'est pas mieux reçue par Mirabeau qui la combat encore
dans ses Lettres à mes commettants (Lettres du comte Mirabeau à ses commettants, 10 mai 1789-25 juillet 1789, publication des comptes-rendus de l'Assemblée). Président
de l'Assemblée le 31 août 1789, l'évêque de Langres est porté à la
présidence par 499 voix sur 809 votants. L'évêque d'Autun,
Tallerand-Périgord en obtenant que 228. La proclamation de son élection
fut applaudie. Il adresse alors ces paroles à l'Assemblée : Comblé
de vos bontés, j'ose les implorer encore pour l'amour du bien public,
pour le maintien de l'ordre ; je réclame votre indulgence. Achevez
votre ouvrage, soutenez ma faiblesse, et aidez-moi à supporter un
fardeau que mes prédécesseurs m'ont rendu pénible. Concourons tous à ce
grand ouvrage du bonheur public ; que le zèle du bien nous réunisse, et
que cette heureuse Constitution soit non-seulement le fruit de vos
lumières, mais encore de votre union et de votre concert. Il démissionne le 9 septembre 1789. Malade et affecté par les évènements, il quitte ses fonctions
législatives après les journées du 5 et 6 octobre 1789. Clairvaux, le 2 décembre 1789. Monsieur le président, retenu depuis six semaines par une maladie douloureuse, affaibli par la violence de mes maux, incertain de leur forme, perdant l'espérance d'être de longtemps en état d'aller reprendre mes fonctions, je me détermine enfin avec une peine bien sensible à me démettre de la commission aux États-Généraux qui m'avait été donnée par le bailliage de Langres ; je vous supplie de présenter à l'Assemblée nationale mes regrets bien vifs de ne pouvoir plus coopérer à ses travaux et ma respectueuse reconnaissance des bontés dont elle m'a honoré. Je suis avec respect, Monsieur le président, votre très humble et obéissant serviteur.
L'évêque
duc de Langres. En 1791, il refuse la Constitution civile du clergé. Il ne prête pas serment. Il donne le 15 mars 1791, à Langres, une instruction
aux curés, vicaires et autres ecclésiastiques de son diocèse qui n'ont
pas prêté le serment ordonné par l'Assemblée nationale (Instruction éditée à Paris par l'imprimerie de Guerbart). Après
avoir passé un temps dans son diocèse, il émigre d'abord en Suisse,
puis en Autriche, où il rejoint son frère César-Henri, retiré dans la
terre de Bernau, près de Wels, et ensuite en Italie et se fixe à Venise. Durant son séjour à Venise, il se dépense pour le
secours des prisonniers de guerre français qui dans les hôpitaux sont
touchés par le typhus. Atteint lui même par deux fois par la maladie,
celle-ci le laissera aux portes de la mort. Il revient en France le 12 février 1800. Au Concordat (1802), il donne sa démission d'évêque de Langres. Dans sa retraite, il se consacre à l'étude. Le 16 février 1802, dans une lettre pastorale, il fait part de ses vœux pour le rétablissement du
culte et son adhésion au nouveau concordat passé entre le saint-siège
et le gouvernement français. Lors
de la première Restauration le roi Louis XVIII l'appelle auprès de lui
et le nomme Pair de France, le 4 juin 1814. A son retour de Gand, il
lui restitue son titre de duc et son évêché (Ordonnance royale du 4 juin 1814 ; Lettres patentes du 8 janvier 1818). Il est créé cardinal, le 28 juillet 1817, par le pape Pie VII. Ministre d'État en 1817. Le 30 septembre 1820, le roi le nomme commandeur de l'ordre du Saint-Esprit. Il décède le 21 juin 1821 à Paris, à l'âge de 83 ans. Il sera enseveli dans l'église des Carmes, rue Vaugirard. L'abbé Bellouet prononcera son oraison funèbre à la cathédrale de Langres. Sa bibliothèque est vendue en 1822.
Rapport fait à l'assemblée du clergé, concernant
l'affaire du bureau diocésain de Rodez, contre le sieur Cabrière,
receveur des décimes, 1765 ; Rapports de l'Agence contenant les principales
affaires du clergé, qui se sont passées depuis l'année 1765 jusqu'en
l'année 1770, par M. L'abbé de La Luzerne, ancien agent-général du
clergé, à présent évêque-duc de Langres & M. l'abbé de Cicé, ancien
agent-général du clergé, aujourd'hui évêque de Rodez, avec les pièces
justificatives desdits rapports, imprimerie G. Desprez, Paris, 1774, 771 p. ; Instruction sur le rituel de Langres, imprimerie Jacques-François Couché, Besançon, 1790 ; Catéchisme ou abrégé de la doctrine chrétienne à
l'usage du diocèse de Langres, dressé par Mgr d'Antin. Revu, approuvé et
réimprimé par l'ordre de Mgr César-Guillaume de La Luzerne, évêque, duc
de Langres, avec les instructions pour la Confirmation données par Mgr
de Montmorin, éd. Pierre Defay, Langres, 1790, petit in 8°, 120 p. Instruction pastorale aux curés, vicaires, et autres prêtres du diocèse
de Langres, qui n'ont pas prêté serment (adoptée par trente-trois
évêques de France), Langres, 15 mars 1791, in-8, 38 p. ; Instruction pastorale de Mgr l’Évêque-duc de Langres sur l'Excellence de la Religion, nouvelle édition, s. l., 1793 ; Instruction pastorale de Mr l'évêque de Langres sur la Révélation, Le Clere, imprimeur-libraire, Paris, 1801 ;
Considérations sur divers points de la morale chrétienne, 6 vol., Venise, 1795-1799 ; Lyon, 1815-1816 ; Paris 1829 ;
Considérations sur divers points de la Morale chrétienne, 2e édition, revue et augmentée, 4 vol. Lyon, 1815 ; Explication
des Évangiles des dimanches et de quelques-unes des fêtes principales
de l'année, 5 vol., Lyon 1807 ; nouv. éd. rev. & corr., avouée par
l'auteur, 4 vol., 1816 ; Avignon, Offray, 1818, 1822, 1829 ; nouv. éd.
Lyon, Paris, 1821 ; 5e ed., Paris, 1829 ;
D'azur, à une croix ancrée d'or, chargée de quatre vannets de gueules. Lachesnaye donne cinq coquilles et ajoute que dans les anciens armoriaux la croix des La Luzerne est remplacée par une anille ou fer de moulin (Daguin, 1877). La maison de la Luzerne tire son nom d'une terre avec paroisse, située entre Avranches et Granville, possédée au XIe siècle par Thomas de la Luzerne, chevalier qui en 1096 accompagna Robert, duc de Normandie à la conquête de la Palestine. sa filiation est établie depuis Guillaume, seigneur de la Luzerne, vivant en 1233, avec Florence de Manneville, sa femme.
COURCELLES (M. chevalier de), généalogiste honoraire du roi, Histoire
généalogique et héraldique des pairs de France, des grands dignitaires de la
couronne, des principales familles nobles du royaume, et des maisons
princières d'Europe, précédée de la généalogie de la maison de France, chez
l'auteur, Paris, 1826, tome VII, pp. 231 & ss. ; MIGNE (J.-P., abbé), Œuvres complètes du cardinal de La Luzerne, évêque de Langres, député aux États-Généraux, pair de France, ministre d'État, etc., 6 vol., J.-P. Migne, éditeur, Paris, 1855-1856 ; DAGUIN (Arthur), Les évêques de Langres. Étude épigraphique, sigillographique et héraldique, Mémoires de la Société historique et archéologique de Langres, Tome III, Langres, Paris, 1877. |
© jchr 23 janvier 2005 / MAJ 26/05/2024/21/08/2024
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